Confiance en soi : cinq astuces pour la saper quand on rédige sa thèse

La confiance en soi : un ingrédient indispensable pour rédiger sa thèse. Et pourtant, comme on arrive bien à la saper quand on rédige sa thèse, justement. Croyances, mauvaises habitudes, réflexes… en voici cinq parmi les plus communs

Comparez-vous aux autres 

Le poison le plus efficace pour tuer votre confiance en vous-même est de vous comparer aux autres.

Gédéon, champion de la comparaison

Mon ami Gédéon me dit toujours : mon collègue de travail reste au bureau jusqu’à 22 heures, alors que moi je décroche déjà à midi.

Ou bien : ma directrice connaît tous les textes sur le bout des doigts, elle a une mémoire extraordinaire – alors que moi, si j’arrive à retenir les titres, c’est déjà beaucoup.

Ou encore : ma voisine a eu un bébé et elle a fini sa thèse, alors que moi je n’ai que ma thèse à rédiger et je n’y arrive pas.

Bref, Gédéon se sent nul – nul en comparaison de tous les génies (supposés)  qu’il côtoie.

Gédéon voit la pointe visible de l’iceberg – ce que les autres veulent bien montrer d’eux-mêmes.

Et il se compare tout entier – l’iceberg Gédéon, cette réalité qu’il connait bien, qu’il ne met pas en scène – à cette pointe.

Sans voir tout ce qu’il y a dessous – des choix, des qualités mais aussi des défauts, de l’entraînement.

Comment se comparer aux autres si on ne voit que la pointe de l’iceberg?

Vous trouverez toujours quelqu’un qui a meilleure mémoire que vous, qui parle mieux, qui court plus vite, qui chante mieux… et alors ?

Certes, cette nécessité de se comparer à autrui est influencée sinon conditionnée par un système éducatif où on apprend très tôt à se mesurer à autrui – il n’est qu’à penser à la distribution des copies en classe – untel a un eu vingt, untel a eu cinq…

Et puis les réseaux sociaux sont aussi devenus un espace de comparaison nocif pour tout ce qui relève de la confiance en soi : il y a toujours quelqu’un de plus beau, de plus riche, de plus intelligent, de plus capable que vous.

Et alors ?

La comparaison est biaisée

En fait, se comparer aux autres, c’est toujours comparer les points faibles des uns aux points forts des autres.

Ce faisant, on use de critères biaisés pour comparer – des critères qui seraient inacceptables dans un travail de recherche.

Donc, pour saper votre confiance en vous-même, compliquez-vous la vie en usant de méthodes que vous n’utiliseriez jamais pour votre travail, tant elles manquent de sérieux.

Au fait… saviez-vous que chaque être humain est un être singulier ? Incomparable ?

Avez-vous conscience d’être un être singulier? Incomparable?

Si oui… alors pourquoi vous comparez-vous aux autres?

Comparez-vous plutôt à la personne que vous étiez il y a trois mois, un an, trois ans… Quelles différences constatez-vous?

Fixez-vous des objectifs inaccessibles

Se fixer des objectifs inaccessibles est aussi une bonne méthode pour se décourager et finir par douter de soi.

Challenge vs irréalisme

Se donner des objectifs au début peut être motivant : on repousse ses limites,on se dépasse, on sort de sa zone de confort.

Mais à la longue…. comme on place la barre tellement haut, on échoue à l’atteindre, ne serait-ce que de loin.

On s’épuise.

On se décourage.

On finir par se trouver nul.

Par se comparer à d’autres qui, eux, ont atteint leur objectif.

A moins qu’on n’ose pas se lancer, tant le projet est ambitieux.

Dans les deux cas, la confiance en soi s’étiole.

Gédéon Superman

Mon ami Gédéon a pour objectif d’écrire une thèse parfaite.

Il aura tout lu sur son sujet.

Chaque phrase sera belle.

Chaque mot précis.

Chaque argument étudié sous tous les angles.

Une thèse qui lui vaudra non seulement l’admiration de ses pairs, mais encore des invitations sur tous les plateaux télé, bien sûr à des conférences, sans compter les prix et les médailles dont on le décorera – il ne parle pas du prix Nobel, mais il y pense.

La conséquence ?

Gédéon n’a pas encore commencé à rédiger. Il est en train de finir sa 6ème année.

Mais il n’a pas encore tout lu.

Sa prose, quant à elle, n’a pas encore atteint le niveau de clarté et de précision – alliées à la beauté – qu’il attend de sa plume.

Autant dire qu’on ne le voit plus nulle part, tant il en a assez de s’entendre demander comment va ta thèse ?

Sans parler de son état psychologique : au fond du trou, confronté à son capacité de produire le chef d’œuvre escompté, incapable de réviser ses objectifs à la baisse, Gédéon se trouve nul, nullissime, archi-nul.

Autosabotage

Rédiger une thèse est un défi, intellectuel et psychologique.

Bien sûr qu’il va falloir vous dépasser, repousser vos limites, sortir de ce qu’on appelle la zone de confort.

Mais faut-il saboter toutes ces victoires sur vous-même en vous fixant des objectifs inaccessibles ?

Ne vous donnez pas d’objectif du tout

Si vous voulez saper votre confiance en vous-même, faire une thèse sans vous donner d’objectifs (objectifs de recherche, objectifs de rédaction) est aussi une méthode efficace.

Quo vadis?

Si je ne sais pas où je veux aller, comment savoir si je suis sur la bonne voie ?

Si je ne sais pas quel objectif je veux atteindre, comment choisir la direction à prendre ?

Si je ne sais pas où je veux arriver, quels repères m’indiqueront-ils que je me rapproche du but – ou au contraire que je m’en éloigne ?

Bref, comment ne pas me sentir perdue si je n’ai pas d’objectif ?

Gertrude, un esprit curieux

Mon amie Gertrude n’avait pas d’objectif précis lorsqu’elle faisait ses recherches.

Son sujet était passionnant, et sa recherche va dans tous les sens : elle papillonnait, butinant ici et là, cherchant sans le trouver son angle d’attaque.

Douée d’un esprit vif et curieux, Gertrude s’intéresse à tout, à toutes les disciplines, crée des liens aussi originaux que passionnants, qui l’amènent à explorer de nouveaux champs.

Ce faisant, elle accumule des tas de données, plus ou moins liées les unes aux autres.

Au moment de rédiger, les problèmes ont commencé : comment faire le tri ?

Selon quels critères, puisqu’il n’y a pas d’objectif de recherche ?

Comment faire le deuil de toutes ses découvertes passionnantes, mais malheureusement sans lien visible avec le sujet (à moins de rédiger une thèse de 2000 pages, mais sa directrice n’en veut pas plus de 300)?

Comment faire un plan cohérent où intégrer des données riches mais sans lien les unes avec les autres ?

Ne sachant où elle veut aller, Gertrude ne sait pas que garder, que jeter.

Elle fait des petits tas qu’elle défait et refait le lendemain.

A force de tergiverser, elle s’épuise.

Se sent submergée par la masse de matériel accumulée.

Mais Gertrude refuse de fixer un objectif à sa thèse, car cet objectif l’obligerait à faire des choix – et donc, répète-t-elle, à ne pas pouvoir dire tout ce qu’elle a à dire sur son sujet.

En attendant, elle n’écrit rien sur ce sujet sur lequel elle a tellement de choses à dire.

Le temps passe.

Et Gertrude ne voit pas par où commencer – puisqu’elle ne sait pas où elle veut finir.

Elle tourne en rond depuis six mois – autant dire que son moral est au plus bas.

Objectif et décision

Se donner un objectif concret, c’est obligatoirement faire des choix.

Prendre des décisions.

Trancher.

Il y a un mot en allemand que j’aime particulièrement, sur lequel nous avions des dissertations à rédiger en fac de philo, c’est Entscheidung – décision : le mot raconte ce qui se passe lors d’une prise de décision.

En effet, le préfixe ent- exprime la suppression, Scheidung veut dire coupure, scission.

L’ Entscheidung met fin à la scission, à la division interne dans laquelle on se trouve.

L’ Entscheidung vous rend un.

L’ Entscheidung rend fort.

Souvenez-vous de la dernière fois que vous avez pris une décision…

Une fois que vous avez tranché, souvenez-vous de ce que vous avez ressenti…

Un recentrage? Une force nouvelle? Une unité intérieure?

Ne pas prendre de décision, c’est rester en état de scission, dans l’incapacité de trouver l’équilibre, de prendre position, de trouver sa place.

Comment se sentir en confiance dans un état d’indécision?

Une mauvaise décision peut se corriger.

Pas de décision du tout, non.

Bref, si vous voulez saper votre confiance en vous-même, ne prenez pas de décisions : moins vous en prendrez, moins vous aurez le courage d’en prendre et de trancher.

En revanche, si vous vous entraînez à prendre des décisions, à trancher – vous verrez se renforcer votre confiance en vous-même.

Prendre une décision n’est pas toujours facile.

Mais mieux vaut une mauvaise décision que pas de décision du tout.

Attendez et ne faites rien

Tant que vous ne faites rien, vous ignorez ce dont vous êtes capable. Vous pouvez rêver de tout ce que vous pourriez faire, si seulement vous vous lanciez.

La peur de se lancer

Ne vous lancez pas.

Attendez que les conditions idéales soient toutes réunies, attendez de tout maîtriser, attendez d’avoir une compréhension parfaite de votre sujet.

Vous risquez d’attendre longtemps.

D’ailleurs, savez-vous que vouloir tout maitriser, tout contrôler, ne pas faire d’erreur n’est pas une preuve de confiance en soi?

Au contraire : la confiance en soi est une aptitude à accueillir l’aléatoire, le contingent, l’inattendu.

Ou plutôt : la confiance en soi est la confiance que vous avez dans vos propres ressources pour faire face à ces surprises.

La confiance en soi résulte aussi de l’acceptation de l’erreur – et de la capacité à apprendre de ses erreurs.

En outre, vouloir tout maitriser conduit à vous mettre sous une pression insupportable, qui non seulement vous bloque, mais encore biaise votre perception des choses.

Le secret de l’action, c’est de s’y mettre.

Alain

Passez à l’action : commencez à rédiger.

Alors – et alors seulement – vous verrez ce dont vous êtes capable.

Vous vous découvrirez des aptitudes insoupçonnées, des ressources oubliées, des connaissances dont vous n’aviez pas conscience.

C’est dans l’action que vous pouvez vous confronter à vous-même, que vous allez mettre en mouvement une infinité de richesses intérieures que vous ne vous connaissez pas – et vous étonner de tout ce que vous savez.

Le passage à l’acte est un révélateur

C’est en passant à l’acte, en écrivant, que vous allez prendre conscience de tout ce que vous savez (peut-être identifier quelques lacunes – à vous de voir s’il faut les combler ou passer à côté).

C’est en écrivant que vous allez créer des liens entre des idées, entre des auteurs, donner du sens à ce que vous savez.

Ecrire boostera votre confiance en vous-même : vous vous découvrirez parfois un savoir insoupçonné, des idées originales, des associations judicieuses.

Tant que vous ne passez pas à l’écriture, vous ne saurez rien de tout ce potentiel en vous.

Aussi, si vous voulez saper votre confiance en vous-même, ne faites rien – surtout ne rédigez pas.

Attendez.

Le moment propice.

L’illumination.

L’inspiration.

Personnellement, je les ai attendus plus d’un trimestre avant de comprendre qu’ils ne viendraient que si je ne mettais la main à la pâte.

Autant vous dire que pendant ce trimestre d’attente, ma confiance en moi était au plus bas. 

Dispersez-vous autant que faire se peut

Une to-to list interminable au moment où toutes vos forces doivent converger vers la rédaction de la thèse est aussi un bon moyen pour épuiser votre confiance en vous-même.

Quand le prioritaire passe à la trappe

Hildegarde va rédiger.

Ma priorité, c’est ma thèse, a-telle déclaré.

Comme elle avait entendu dire que ce serait une période charnière dans sa vie, elle avait décidé ce serait une période qui révolutionnerait sa vie :

  • elle se mettrait au sport (3h par semaine, lundi, mercredi et samedi matin)
  • elle perdrait dix kilos (rencontre avec son club tous les mardis matin)
  • elle arrêterait de fumer (autre club, le jeudi matin)
  • elle se mettrait à la gouache (cours du soir le lundi)
  • elle se mettrait à la méditation (cours du soir le mardi et le vendredi)
  • elle animerait le club de lecture pour enfants dans son quartier (mercredi après-midi) …

La liste ne s’arrête pas là, mais j’ai oublié la suite – elle aussi, d’ailleurs.

Car au fur et à mesure du temps, non seulement les éléments de sa liste s’évaporaient, mais elle s’épuisait – et sa thèse n’avançait pas.

Ma thèse est ma priorité (du latin « prior, premier des deux »), répétait-elle à qui voulait l’entendre…

Mais dans la réalité, sa thèse arrivait en dernier, quand elle avait le temps.

C’est-à-dire : jamais.

Car remplir sa to-do list au moment où la priorité est quelque chose d’aussi exigeant que l’est une rédaction de thèse, c’est se condamner à l’échec.

Hildegarde papillonne.

S’éparpille.

S’épuise.

Remet la rédaction au lendemain.

Voit le temps passer.

Voit ses collègues avancer dans la rédaction.

Elle se compare à eux.

Elle ne va plus aux cours de gym.

Ni au club du mardi.

Elle fume comme un pompier.

Elle s’est excusée auprès de la bibliothécaire qui dirige le club de lecture.

Elle ne médite plus – quant à la gouache, elle a abandonné.

Donne-toi peu de choses à faire si tu veux avoir du courage.

Sénèque

Et elle constate le désastre : en six mois, non seulement elle n’a rien fait pour sa priorité, mais en outre elle a abandonné tous ses projets.

Sentiment d’échec indescriptible – honte, culpabilité… et une immense fatigue.

Pour conclure : quand on rédige, la vie continue

Bien sûr que la rédaction de thèse n’est pas une période monacale, et que la vie continue.

Il y a le travail, la famille.

Il y a des activités connexes, nécessaires à la détente, au repos, à l’équilibre.

Mais si la priorité est la rédaction, la rédaction vient en premier.

Si au contraire elle se voit réléguée par toutes ces activités connexes en bas de la to-do list, alors elles vont vous décourager, vous épuiser…

Et empêcher ce passage à l’action qu’est la rédaction de votre thèse.

Sans confiance en soi, les compétences que l’on a sont peu utiles.

La confiance en soi est le socle sur lequel vont se construire et se développer toues les compétences que vous allez acquérir.

Aussi est-il indispensable, notamment au moment de la rédaction, de la conforter, de l’alimenter – de la cultiver.

Et de veiller à ne pas la saper par des comportements nuisibles : se comparer aux autres, des objectifs inaccessibles ou inexistants, l’attentisme ou la dispersion sont quelques uns parmi les nombreux facteurs nuisibles à la confiance en soi.

Si vous voulez aller plus loin, lisez La confiance en soi. Une philosophie, de Charles Pépin.

Ce n’est pas un énième livre de développement de soi, mais plutôt une réflexion philosophique aussi originale que pratique sur le phénomène de la confiance en soi.

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